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Le vendredi 4 décembre 2009, des dizaines de milliers de travailleurs mexicains de l’énergie licenciés et leurs sympathisants sont encore une fois descendus dans les rues de la capitale. Ils protestaient contre la liquidation soudaine par le gouvernement, le soir du 10 octobre, de la Société de lumière et d’énergie (Luz y Fuerza Central), propriété de l’État, et contre l’ingérence du gouvernement dans les affaires du Syndicat mexicain de l’électricité (SME). Le gouvernement Calderón soutient qu’il a pris cette mesure parce que la société était inefficace et perdait de l’argent; les opposants, quant à eux, croient que le gouvernement veut privatiser la LFC et briser le puissant Syndicat indépendant des travailleurs mexicains de l’électricité (SME) qui représentait les 44 000 employés actifs et 22 000 retraités de la société.[1] 

Au rassemblement du 4 décembre 2009, le SME a annoncé que le gouvernement mexicain avait enfin accepté de négocier par l’entremise d’une équipe de médiateurs approuvés par le syndicat.

Le même vendredi, le gouvernement mexicain annonçait qu’il accorderait l’assurance-maladie complémentaire à tous les travailleurs licenciés pour un an. Auparavant, seuls ceux qui acceptaient de signer des contrats individuels avec le gouvernement pour reconnaître leur congédiement recevaient l’assurance-maladie pendant un an, dans le cadre d’une offre améliorée de départ. Les membres du SME qui continuaient à résister aux tentatives du gouvernement pour diviser et affaiblir le syndicat perdaient leur assurance médicale après le minimum légal de huit semaines, même s’ils n’avaient reçu aucune indemnité de départ.

Les membres de la délégation canadienne et américaine qui s’est rendue au Mexique la semaine dernière ont souligné l’injustice fondamentale d’une telle politique lors d’une rencontre avec le sous-ministre du Travail et des Services sociaux au dernier soir de leur séjour à Mexico.

Les membres canadiens de la délégation conjointe CTC/AFL-CIO qui ont séjourné au Mexique du 30 novembre au 3 décembre 2009 étaient : Hassan Yussuf et Sheila Katz du CTC; Barb Dolan du SCEP; Paul Turtle des MUA; Shelly Gordon, conseillère à la recherche du SCFP. Les membres américains étaient Carl Wood du Utility Workers’ Union, qui a pris la défense de l’énergie publique au Canada; Dan Kovalik des USWA; et Stanley Gacek de la direction des affaires internationales de l’AFL-CIO. Andrew Dinkelaker du UE (syndicat de l’électricité) s’est aussi joint à la délégation.

Le gouvernement mexicain s’ingère dans les affaires du SME depuis l’été dernier, lorsqu’il a refusé de reconnaître le résultat des élections à la direction et a gelé les avoirs du syndicat. Martín Esparza a remporté les élections au poste de secrétaire général, défaisant par une mince majorité l’ancien trésorier du syndicat, qui coopère maintenant avec le gouvernement. Le 2 décembre, le ministre du Travail et des Services sociaux a annulé les élections. Le syndicat a contesté l’autorité du gouvernement dans cette affaire devant les tribunaux. Le seul autre syndicat qui a fait l’objet d’une ingérence de cet ordre est celui des mineurs, un syndicat militant et démocratique, qui critique le gouvernement mexicain.

Le SME s’est opposé à la privatisation de l’électricité au Mexique. Dernièrement, le SME a lutté pour que le câble de fibres optiques installé à Mexico reste public. Il a fait campagne en faveur d’un « triplé » – qui offrirait les services d’Internet, de téléphonie et de cablodiffusion par des lignes publiques, dans l’intérêt public. Pour le SCFP, c’était le « retour vers le futur », la copie conforme du conflit d’intérêt entre l’énergie et les communications publiques et privées au Canada. Un avocat constitutionnel mexicain bien connu a contesté en cour l’autorité du président

Calderón dans la liquidation d’une société d’électricité publique.

Au fil des ans, le SME a particulièrement bien réussi à résister à la sous-traitance de son travail. Le gouvernement offre maintenant aux employés licenciés de Luz y Fuerza la formation et l’aide nécessaires pour devenir des entrepreneurs indépendants qui, s’ils sont choisis, pourront travailler pour l’autre société, la Commission fédérale de l’électricité, sans sécurité d’emploi, ni avantages sociaux, ni régime de retraite. 

Les membres de la délégation syndicale du Canada et des États-Unis ont été extrêmement impressionnés et touchés par l’organisation, la solidarité et la force des membres du SME. Au centre-ville de Mexico, des femmes représentant les travailleuses des services administratifs et de bureau ont établi un campement devant la terrasse de l’édifice de la Commission fédérale de l’électricité (CFE), l’autre société mexicaine à qui le gouvernement a remis tous les avoirs de Luz y Fuerza. Onze des femmes membres du SME font la grève de la faim. Elles ont collé leurs propres affiches sur les fenêtres de l’édifice de la CFE ainsi que des messages d’appui. Elles ont même accroché une bannière de Luz y Fuerza par-dessus l’enseigne de la CFE, deux étages au-dessus de la rue. Les membres de la délégation canadienne et américaine ont exprimé leur appui aux femmes à un rassemblement organisé devant leur camp et ont laissé des messages d’appui à coller dans les fenêtres.

D’autres membres du SME ont érigé un campement devant le congrès mexicain. Là aussi, il y a des grèves de la faim et toujours des centaines de sympathisants qui scandent des slogans louant la force du SME. Partout où le syndicat a manifesté ou installé des piquets, on retrouve des douzaines de bannières peintes à la main, des affiches, des effigies, des caricatures et des installations artistiques. Les deux camps sont entourés de fils auxquels sont accrochés des « sacs d’argent » décorés de « rats ».

Les lignes de piquetage érigées aux différentes installations de Luz y Fuerza ont pour but de garder le matériel à l’intérieur, avec les policiers et soldats armés qui ont saisi les bureaux, les usines et les sous-stations, afin d’empêcher le gouvernement de dépouiller la société de tous ses avoirs avant d’avoir conclu un règlement avec le syndicat. En même temps, les piqueteurs et les manifestants ont commencé à ramasser de l’argent pour eux-mêmes et leur syndicat en lavant des voitures, en faisant des travaux d’électricité et de plomberie, en cuisinant des repas chauds à un stand de rue, en vendant des arbres de Noël miniatures pour la Journée mondiale du sida et même en demandant des dons en argent aux personnes qui entrent et sortent du congrès.  Des alliés (groupes syndicaux et paysans) viennent porter des dons de fèves, de riz et de massa.

Les membres de la délégation syndicale CTC/AFL-CIO ont rencontré des avocats constitutionnels et du travail qui leur ont expliqué les lois mexicaines et les causes du SME devant les tribunaux. À une conférence de presse, les dirigeants de la délégation CTC/ALF-CIO ont annoncé leur intention de déposer une plainte conjointe contre le Mexique pour violation de ses propres lois du travail en vertu de l’accord parallèle de l’ALÉNA sur les droits du travail. Les deux centrales syndicales feront campagne contre la faiblesse de l’accord parallèle lorsque ce dernier fera l’objet d’une révision par les trois ministres du travail au printemps prochain.

La délégation canado-américaine et les sympathisants du SME au congrès mexicain, en grande partie membres du PRD (Partido de la Revolución Democrática), ont échangé des déclarations de solidarité et d’engagement, ainsi qu’avec les dirigeants de syndicats alliés, le

STRM (travailleurs du téléphone) et le SNTMMSRM (mineurs). Plus tard, les délégués ont rencontré des représentants des ambassades canadienne et américaine pour leur faire part de leur point de vue. Ils leur ont bien fait comprendre que les syndicats des trois pays s’opposeront à la signature d’accords de commerce avec le Mexique tant que ce pays brisera ses propres lois du travail et des droits de la personne. Comment peuvent-ils soutenir que les sociétés mexicaines respecteront les droits de la personne et les droits du travail si même le gouvernement ne le fait pas?

Le CTC invitera chacun des syndicats membres de la délégation à apporter une aide financière à court terme au SME et tous organiseront d’autres activités de solidarité au cours des prochaines semaines.

Shelly Gordon, qui travaille en Ontario, est conseillère à la recherche du SCFP national.