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Le ministre des Finances, Jim Flaherty, affirme que sa marge de manoeuvre pour le budget fédéral de cette semaine est extrêmement limitée. Les éditorialistes des médias nationaux en ont convenu, ce qui a permis de minimiser les attentes de la population canadienne envers le gouvernement.

En effet, ils ont raison jusqu’à un certain point, mais seulement parce que M. Flaherty a déjà réduit les impôts de plus de 30 milliards de dollars par année. Ces réductions d’impôts ont été extrêmement inefficaces et ont imprudemment réduit les surplus d’Ottawa prévus pour les années à venir.

Mais par leur fixation sur les contraintes, ils ne voient plus les possibilités qui sont quand même bien là. 

En adoptant seulement trois mesures toutes simples, Ottawa pourrait générer suffisamment de recettes qui lui permettraient de prendre des dispositions à la fois audacieuses et positives pour reconstruire notre économie et notre société.

1: Imposer les gains en capital privé au même taux que les revenus des travailleurs canadiens

Récemment, le ministère des Finances de M. Flaherty a publié le rapport Dépenses fiscales et évaluations pour l’année 2007. Ce rapport présente une estimation des coûts que représentent pour le gouvernement fédéral les divers crédits d’impôts, déductions, exemptions et autres niches fiscales. Les médias canadiens n’en ont rien dit.

 

Bon nombre des travailleurs canadiens connaissent peu ou pas du tout la plupart de ces niches fiscales. L’une des plus connues, et de plus en plus coûteuses, dont peuvent profiter les mieux nantis est celle du taux d’imposition inférieur sur les gains de capital et les options d’achat d’actions. Les particuliers et les entreprises ayant réalisé des gains en capital à la vente d’actifs ou d’actions jouissent d’un taux d’imposition deux fois plus faible que celui que paient les Canadiens ordinaires sur leur salaire durement gagné. Selon le rapport, le gouvernement fédéral perdra plus de 11 milliards de dollars en revenus cette année par suite de cette seule niche, une perte supérieure de près de 50 % aux prévisions de l’année précédente.

Cette niche fiscale favorise incroyablement les riches. D’après les derniers chiffres de Revenu Canada, plus de 66 % de la valeur de cette niche fiscale est attribuable aux paliers supérieurs de 4 % des déclarants dont le revenu annuel est supérieur à 100 000 $. Les très biens nantis ont donc un taux d’imposition moins élevé que la plupart des Canadiens.

La déduction accordée au titre des options d’achat d’actions est encore plus scandaleuse. La plupart des cadres d’entreprises sont rémunérés sous forme d’options d’achat d’actions, qui sont imposées à la moitié du taux applicable à la rémunération normale, et cette stratégie entraîne annuellement une réduction d’impôts de plusieurs millions de dollars pour les dirigeants les mieux payés.

Ottawa pourrait augmenter ses revenus de 8 milliards de dollars, chaque année, en appliquant le même taux d’imposition sur les gains de capital que sur toute autre forme de revenus.

2. Abroger les réductions de l’impôt fédéral des sociétés

Jeudi dernier, Statistiques Canada a dévoilé le total des bénéfices réalisés par les sociétés. Depuis huit ans, les bénéfices des sociétés ont connu une augmentation de plus de 11 % par année; ils ont donc plus que doublé au cours de cette période.

 

Une fois de plus, en 2007, les sociétés canadiennes ont réalisé des profits record, qui ont augmenté de 8 % par rapport à 2006 pour atteindre le montant astronomique de 262,5 milliards de dollars. Pour mettre ce chiffre en perspective, ce montant représente 17 500 $ pour chacun des 15 millions de foyers au Canada.

Où est donc passé tout cet argent? Au cours de la même période, les investissements en capital dans les entreprises ont connu une hausse de seulement 5,3 % par année, ce qui représente la moitié de l’augmentation des profits, tandis que les investissements des entreprises en machinerie et équipement ont augmenté de seulement 3 % par année. Par conséquent, le taux de croissance de notre productivité est en plein marasme. Entre-temps, le salaire moyen des travailleurs a littéralement stagné, augmentant d’un peu plus de 2,7 % par année pour ainsi demeurer à peine au-dessus de l’inflation.

En dépit de ces profits et surplus records, le gouvernement conservateur continue de réduire l’impôt des sociétés et tente maintenant d’intimider les provinces pour qu’elles en fassent autant. Pour les cinq prochaines années, les réductions de l’impôt fédéral des sociétés se chiffreront à 50 milliards de dollars. Même si M. Flaherty promet que le Canada aura le taux d’imposition des sociétés le plus bas parmi les pays du G7 d’ici 2012, les groupes de pression continuent de réclamer des baisses d’impôts.

Une baisse d’impôts favorise-t-elle vraiment la promotion de l’investissement et de la concurrence? Il existe peu de preuve à l’effet que les réductions d’impôts ont stimulé l’investissement ou augmenté notre productivité.

En fait, de faibles taux d’imposition des sociétés pourraient nuire à notre croissance économique en permettant aux entreprises d’atteindre plus facilement leur taux de rendement de l’investissement sans devoir fournir l’effort d’augmenter leur investissement ou leur productivité.

En s’abstenant de mettre en œuvre les réductions prévues de l’impôt fédéral des sociétés pour cette année et les suivantes, le gouvernement fédéral pourrait gagner 2,8 milliards de dollars cette année et 4 milliards l’année suivante, pour atteindre les quelque 11 milliards d’ici 2012.

3: Taxes sur les émissions de carbone et revenus du carbone

Mardi dernier, Carole Taylor, ministre des Finances de la C.-B., a présenté l’impôt sur le carbone comme pièce maîtresse du budget 2008 de la province.

 

Fait intéressant, cette nouvelle taxe présente une structure et un taux similaires à ceux de l’Alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral de 2007, qui comprenait également un remboursement de la taxe verte pour les familles à faible revenu.

Malgré tout l’alarmisme du gouvernement fédéral quant aux préjudices économiques causés par des mesures environnementales, les entreprises n’ont pas sorti leur rengaine habituelle sur les taxes. En fait, cette nouvelle taxe a été accueillie de façon étonnamment positive. Il aurait été préférable qu’une meilleure proportion des revenus découlant de cette taxe soit consacrée aux familles à faible et à moyen revenu ainsi qu’aux programmes environnementaux, mais un premier pas venait au moins d’être franchi.

Si le gouvernement fédéral instaurait une taxe sur le carbone ainsi qu’un système de plafonnement et d›échanges à un taux de 30 $ par tonne, il pourrait récolter des revenus d’environ 7 milliards de dollars de la part des industries du transport et du chauffage et jusqu’à 10 milliards de dollars de la part des grands pollueurs.

La combinaison de cette taxe et des remboursements progressifs de la taxe permettrait aux familles à faible et moyen revenu de ne pas en souffrir, et des programmes écoénergétiques et de rénovation viendraient aider la population et les employeurs à effectuer les modifications.

Grâce au financement provenant de ces trois mesures, le gouvernement fédéral pourrait :

  • diminuer grandement la pauvreté chez les enfants, grâce à une augmentation de la prestation fiscale pour enfant à 5 000 $;
  • lancer un nouveau programme national public sans but lucratif d’apprentissage et de garde des jeunes enfants afin que toutes les familles puissent avoir accès à des services de garde de qualité à un coût nominal;
  • renforcer les soins de santé publics par l’intermédiaire d’un régime national d’assurance-médicaments en vue d’offrir à tous ceux qui en ont besoin les médicaments nécessaires à prix modique;
  • augmenter le financement pour les universités et les collèges afin d’augmenter l’accessibilité à l’éducation post-secondaire; respecter les engagements du gouvernement fédéral envers les Premières nations, en vertu de l’accord de Kelowna;
  • financer un plan efficace en matière de changements climatiques, ainsi que des crédits d’impôt remboursables pour s’assurer que les familles à faible et moyen revenu ne sont pas lésées;
  • rééquiper notre secteur manufacturier pour en accroître l’efficacité, ainsi que les caractères écologique et concurrentiel.

 

Grâce à une mesure supplémentaire, c’est-à-dire ramener la TPS à 6 % et fournir ce financement aux municipalités, la dette liée aux infrastructures municipales pourrait rapidement être éliminée, ce qui permettrait aux municipalités de rétablir des services, de réduire la pression en matière d’impôts fonciers et des frais d’utilisation, ainsi que de renverser la tendance à la privatisation.

Il y a de véritables choix à poser et des avenues bien concrètes à mettre de l’avant dans le cadre du budget du gouvernement fédéral. Rien de complexe, mais qui exige une vision, du courage, de l’honnêteté et un engagement envers le bien public.