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Le 7 août 2007

Le très honorable Stephen Harper
Premier ministre du Canada
Bureau du premier ministre
80, rue Wellington
Ottawa, ON  K1A 0A2

Monsieur le Premier Ministre,

Dans le dossier de la promotion par l’Association médicale canadienne d’un plus grand rôle du secteur privé dans le système de santé, je vous écris au nom des 560 000 membres du Syndicat canadien de la fonction publique pour vous demander de veiller à l’application de la Loi canadienne sur la santé et d’adopter des solutions publiques qui renforceront le régime d’assurance-maladie.

Dans une lettre du 3 avril 2006 au premier ministre Ralph Klein de l’Alberta, vous avez invoqué le principe de l’égalité d’accès et avez carrément contesté le modèle de double pratique que promeut maintenant l’AMC. Depuis, votre gouvernement n’a pas changé son fusil d’épaule eu égard à la double pratique mais a permis la prolifération de cliniques privées qui érodent le système de soins universels à palier unique.

Sur la question des médecins qui pratiquent dans les systèmes à la fois public et privé, vous avez correctement affirmé ceci : « La double pratique plonge les médecins dans une situation de conflit d’intérêt vu qu’ils seraient ainsi financièrement motivés à transférer des patients vers leur pratique privée. De plus, la double pratique légitime le resquillage puisqu’elle met en place un mécanisme autorisé en vertu duquel des patients peuvent se hisser à la tête des listes d’attente en offrant de payer pour leurs traitements. De surcroît, une telle double pratique risque de mener à un exode de médecins ruraux vers les villes. » Votre ministre de la Santé, Tony Clement, a réitéré ces arguments la semaine dernière, en soulignant que des médecins ne démordent pas de la double pratique parce qu’elle est lucrative et « leur permettrait de bonifier leur revenu garanti dans le privé ». Nous avons confiance que votre position sur la double pratique ne change pas et nous vous demandons d’appliquer la même logique aux cliniques privées.

Vous prétendez défendre le principe de l’accessibilité, pourtant, votre gouvernement permet le resquillage et l’expansion rapide des cliniques à but lucratif. Lorsque vous vous êtes adressé au gouvernement albertain l’année dernière, vous avez affirmé que « les citoyens réclament un accès plus rapide… mais l’accès aux soins doit également être équitable et non dicté en fonction de la capacité de payer de la personne ».

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Pour respecter votre parole et vous acquitter de vos obligations en vertu de la Loi canadienne sur la santé, vous devrez exiger des provinces des programmes de surveillance et de déclaration exhaustifs, mener des enquêtes sur les violations et pénaliser financièrement les provinces qui tolèrent des violations de la Loi.

À Vancouver, à Montréal et dans d’autres villes où des cliniques privées fournissent des services médicalement nécessaires, c’est de plus en plus la richesse financière d’un patient qui dicte la facilité avec laquelle il accède à des soins de santé pendant que votre gouvernement reste muet. Encore une fois l’année dernière, vous avez omis d’exiger des déclarations adéquates en vertu de la Loi canadienne sur la santé, et les sanctions imposées dans les cas où la Loi avait été violée ont été négligeables. En fait, en approuvant les modèles de « garantie de soins » qui dirigent les fonds vers les cliniques privées, créent une mise en concurrence et permettent l’assurance privée de services médicalement nécessaires, vous ouvrez la porte à la privatisation et aux soins de santé à deux vitesses.

Enfin, dans le dossier de l’assurance privée, votre gouvernement envoie des messages variés. Dans votre déclaration d’avril 2006, vous établissiez correctement un lien entre l’assurance privée et le resquillage. « Mon inquiétude est à savoir si l’élargissement de l’assurance privée inclurait les services de santé financés par le public, ce qui aurait pour effet d’accélérer l’accès aux soins pour celles et ceux ayant les moyens financiers de souscrire une assurance privée. » Vous y aviez également avancé que la désassurance de services « risquait d’étendre la couverture de l’assurance-maladie privée, limitant ainsi potentiellement l’accès à une couverture pour celles et ceux n’en ayant pas les moyens financiers ou non admissibles en raison d’une affection préexistante. » Là encore, vos actions ne reflètent pas vos paroles. Votre gouvernement a publiquement loué la « garantie de soins » adoptée par le Québec, autorisant l’assurance privée de services médicalement nécessaires. Si vous souhaitez sincèrement maintenir un système de santé à palier unique, vous devrez contester la promotion par le Québec et l’Association médicale canadienne de l’assurance privée des services médicalement nécessaires.

Nos 170 000 membres qui travaillent en soins de la santé savent que la « soupape de sûreté » de cliniques privées et d’assurance privée de l’AMC est en fait une « soupape de revenus » pour les médecins et les investisseurs à but lucratif. De plus, puisqu’ils travaillent en première ligne et avec des défenseurs des droits des patients, ils savent que les gouvernements qui défendent le régime d’assurance-maladie ont accès à des solutions publiques aux problèmes de financement et de listes d’attente. Pour contrôler les coûts des soins de santé, nous devrons nous doter d’une stratégie nationale d’assurance-médicaments prévoyant le paiement de cotisations à partir du premier dollar pour les médicaments essentiels inscrits sur un formulaire national, l’achat en vrac de médicaments d’ordonnance, la prescription de médicaments fondée sur des données probantes et des contrôles plus rigoureux sur la commercialisation des médicaments.

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Pour réduire les listes d’attente, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux devront investir dans les ressources humaines et l’infrastructure publique des soins de santé et promouvoir des listes centralisées, la prise en charge, les équipes de soins et la planification de la santé publique. Dès maintenant, il faut investir dans les soins publics sans but lucratif à domicile, communautaires et de longue durée et adopter des normes pancanadiennes régissant ces soins. Surtout, les solutions adoptées doivent renforcer et élargir le régime public d’assurance-médicaments pour qu’il demeure un système dont le financement et la prestation relèvent du secteur public, conformément à la Loi canadienne sur la santé.

Nous nous attendons à une démonstration de la part de votre gouvernement qu’il prend au sérieux l’égalité d’accès aux soins de santé.

Agréez, Monsieur le Premier Ministre, l’expression de mes sentiments sincères.

Le président national,





PAUL MOIST



c.c. :    L’honorable Tony Clement, ministre fédéral de la Santé
        Colin McMillan, président de l’AMC



cc:sepb491