Message d'avertissement

Attention : cette page est tirée de nos archives. Il se pourrait que notre site Internet contienne des informations plus récentes sur ce sujet. Pour le savoir, utilisez notre moteur de recherche.

Le problème de ne pas avoir suffisamment de temps pour accomplir l’ensemble des tâches s’aggrave avec l’augmentation du nombre de travailleuses et travailleurs à temps partiel et occasionnels. Pour mieux comprendre le problème, imaginez une pièce de monnaie.

Côté face, on trouve des gens qui ont besoin de travailler mais qui gagnent des bas salaires et n’obtiennent pas d’avantages sociaux. Il n’y a peut-être ni syndicat ni sécurité d’emploi et aucun droit d’ancienneté. La formation est peut-être minime tandis que le niveau de stress est important et que les responsabilités sont nombreuses.

D’ordinaire, le personnel occasionnel ne travaille pas à temps plein à moins d’être appelé au travail, à court préavis très souvent, parce que cela convient à l’employeur. La travailleuse ou le travailleur occasionnel est souvent déjà désavantagé. Plusieurs femmes immigrantes, travailleurs de couleur, travailleuses et travailleurs ayant une invalidité et des personnes jeunes ou plus âgées occupent ces emplois occasionnels. On leur demande de rentrer au travail pendant les périodes de pointe et on s’attend à les voir assumer une charge complète.

Côté pile, on trouve la personne qui a un emploi à temps plein avec avantages et syndicat. Ces personnes sont probablement soumises à des pressions accrues pour qu’elles travaillent plus fort et des heures plus longues en compagnie d’un moins grand nombre de collègues. Il arrive souvent que leurs charges de travail augmentent car on s’attend à les voir s’occuper de la formation du personnel occasionnel en plus de s’acquitter de leurs tâches habituelles.

Les personnes qui travaillent à temps plein connaissent la nature des tâches et le milieu de travail. Ainsi, elles passent leur temps à orienter, à surveiller et à parfaire le travail du personnel occasionnel qui ne connaît pas encore toutes les facettes de l’emploi. À la fin du quart de travail, les travailleuses et travailleurs occasionnels peuvent quitter leur poste, que le travail ait été fait ou non. Les employés à temps plein subissent les conséquences d’un travail inachevé ou mal fait. C’est à ces personnes de terminer ce qui a été laissé en plan.

Il est probable que l’employé à temps plein sera de sexe masculin, blanc de peau et de langue anglaise. Mais peu importe son histoire personnelle, son travail devient de plus en plus stressant et exigeant. En même temps, cette personne sait que son employeur veut embaucher des travailleuses et travailleurs qui lui coûtent moins cher et qui ne sont pas protégés par une convention collective.

Bref, la précarisation de plus en plus fréquente engendre de l’épuisement professionnel chez les travailleuses et travailleurs du secteur public. Elle crée également de la concurrence entre employés et mine les gains durement obtenus à la table de négociation. Pourquoi cette situation existe-t-elle et que pouvons-nous faire pour y remédier?

Pourquoi la précarisation?

Si un employeur peut rendre ‘occasionnel ’ une plus grande part de son personnel, moins de personnes travailleront des semaines de travail normales, recevront des avantages complets et profiteront de droits d’ancienneté, seront membres de syndicats ou auront le contrôle de leur charge de travail.

En gros, la précarisation permet aux employeurs d’obtenir plus de flexibilité pour eux-mêmes tout en augmentant le niveau d’insécurité des travailleuses et travailleurs. De plus, avec la précarisation, les employeurs peuvent accroître leur productivité par l’accélération du rythme de travail, la normalisation des procédures, les compressions de personnel, la polyvalence, la réduction des services à la population et le sous-financement.

Pour quelle raison nos employeurs désirent-ils plus de flexibilité et une productivité accrue? Les gouvernements ont sous-financé et restructuré les services publics en se basant sur les valeurs du secteur privé. Ils peuvent vouloir préparer le terrain pour la privatisation des services publics ou ils peuvent vouloir se soustraire à des accusations de financer injustement des services que les sociétés privées veulent fournir et vendre. Alors ils insistent sur la flexibilité tout en augmentant la productivité comme si, dans l’esprit de la concurrence mondialisée, ils tentaient de maximiser leurs profits.

Il y a quelques années seulement, tout le monde était d’accord pour dire que certaines chose ne devaient être ni achetées ni vendues. Aujourd’hui, les gouvernements des pays les plus puissants du monde ont décidé de soumettre les services publics à la discipline des marchés.

Comment la précarisation affecte-t-elle les travailleuses et travailleurs

La précarisation affecte nombre de travailleuses et travailleurs. Par exemple, une étude menée en 1998 sur les salaires et les conditions de travail dans les services de garde au Canada concluait que près du tiers du personnel travaille en vertu d’une sorte d’entente de travail occasionnel. Ceci demeurait vrai même si 91 pour cent des éducatrices et éducateurs travaillaient plus de 30 heures par semaine.

Un cinquième de ces travailleuses et travailleurs ont pris un emploi en plus. Quatre-vingt pour cent d’entre ces personnes le font parce qu’elles ont besoin d’un plus gros revenu pour vivre. Elles n’ont pour la plupart aucun avantage. En moyenne, les éducatrices et éducateurs en garderie et les aides d’enseignement travaillent 4,6 heures supplémentaires non rémunérées par semaine. À l’échelle nationale, le taux de roulement du personnel des services de garde était de 22 pour cent en 1998. Les femmes comptent pour 98 pour cent de ce groupe professionnel.

Au Nouveau-Brunswick, les travailleuses et travailleurs occasionnels n’ont pas le droit d’adhérer à un syndicat. Plusieurs travailleuses et travailleurs du secteur public, notamment le personnel d’hôpital, les gardiennes et gardiens de prison, le personnel des écoles et les conductrices et conducteurs de chasse-neige travaillent sans avoir droit au statut d’employé, à une convention collective ou avoir le droit de se syndiquer.

Marie-Lyne Blanchard est une travailleuse occasionnelle qui a perdu son emploi le jour précédent son départ en congé de maternité. Le SCFP du N.-B. a organisé une campagne pour faire modifier la loi. Le syndicat a même soumis une plainte légale à l’Organisation internationale du travail, accusant le gouvernement du Nouveau-Brunswick de bafouer les droits des travailleuses et travailleurs.

Les employés des bibliothèques en Nouvelle-Écosse affirment que l’embauche de personnel à temps partiel et occasionnel augmente. La section locale 3433 du SCFP à Sackville affirme que les travailleuses et travailleurs occasionnels s’acquittent de plus en plus des tâches régulières de codification et de rangement.

En Ontario, les membres de la section locale 3896, dont beaucoup sont des femmes immigrantes, ont fait la grève au Peoples’ Resources in North Toronto (SPRINT). Au bout de 42 jours, un membre écrivait au conseil d’administration :

« Comment est-ce que je peux expliquer ça à mes enfants… Comment leur expliquer pourquoi Jane refuse de créer des emplois à temps plein avec avantages… Pourquoi elle veut traiter les travailleuses et travailleurs des logements supervisés comme du personnel occasionnel même si ces personnes travaillent des heures régulières à temps plein. Comment est-ce que je dois faire pour leur expliquer ça? »

Au Québec, les travailleuses et travailleurs occasionnels de la Ville de Montréal sont protégés par la loi 170 qui prévoit un « niveau minimum de dotation en personnel » dans les conventions collectives mais le gouvernement du Québec veut changer la loi. Le personnel occasionnel a manifesté en décembre 2000 contre les modifications à la loi.

Marie-Claude Maynard, présidente du syndicat des cols bleus occasionnels de la Ville de Montréal, déclare :

« Cette disposition dans nos conventions collectives a permis à des centaines de femmes, de travailleuses et travailleurs occasionnels et de jeunes de trouver un emploi qui, autrement, aurait été donné en sous-traitance. C’est un fait reconnu et bien étayé que les entreprises sous-traitantes n’engagent pas de femmes pour des métiers non traditionnels et offrent des conditions de travail minimales aux jeunes. »

Dans tout le Canada, des membres du corps enseignant qui travaillent à temps partiel et n’ont pas leur permanence assument un pourcentage qui ne cesse de croître de l’enseignement universitaire. Les professeurs à temps partiel constituent le personnel occasionnel des universités.

Sans syndicat, ces personnes ont peu de sécurité d’emploi, peu d’avantages et de bas salaires. Et pourtant, leur charge de travail augmente tandis que les universités ne s’occupent pas de remplacer les membres du corps enseignant ayant leur permanence et qui prennent leur retraite. Les chargés de cours à temps partiel ne sont plus considérés comme des ‘professeurs en formation’. Ils constituent un groupe flexible de travailleuses et travailleurs très productifs et remplaçables.

La précarisation n’est pas inhabituelle dans ce secteur. Statistique Canada rapporte que de tous les types d’emplois non permanents, l’éducation et les services connexes arrivent premier avec un taux de 15,1 pour cent. Environ 1,8 pour cent des travailleuses et travailleurs n’ayant pas un emploi permanent travaillent dans le secteur du commerce de détail. Les services de santé et de bien-être arrivent troisième, avec un taux de 10,3 pour cent. Les services d’hébergement et d’alimentation suivent immédiatement, avec un taux de 8,6 pour cent.

La précarisation affectent différemment certaines personnes

Les employeurs veulent établir la « flexibilité » et réaliser des épargnes en utilisant davantage de personnel pour des emplois occasionnels non syndiqués ou non protégés. Ceci menace certains droits durement gagnés et pourrait inciter les employeurs à exiger des concessions dans les rondes de négociation à l’avenir.

Mais la précarisation ne constitue pas seulement un problème pour les travailleuses et travailleurs ayant les meilleures conventions collectives et les emplois les plus stables. Elle représente aussi un problème pour les femmes au travail qui luttent pour l’égalité.

Au cours des dix dernières années, le nombre de femmes occupant plus d’un emploi a crû de 45 pour cent tandis que le nombre d’hommes avec des emplois multiples n’a augmenté que de 4 pour cent.

De plus, si on compare les emplois à temps plein, une femme gagne 70 pour cent de chaque dollar gagné par un homme au Canada. Pourquoi? En partie parce que beaucoup de femmes travaillent en vertu d’une quelconque entente de travail « occasionnel » et peu stable.

Le gouvernement, les employeurs et même certains conjoints s’attendent à voir les femmes travailler de longues heures pour élever leurs enfants et s’acquitter de tâches non rémunérées au foyer. En l’absence de services de gardes adéquats, la « double journée de travail » empêche les femmes de décrocher des emplois mieux payés et plus stables.

Pour la plupart d’entre nous, le « revenu familial » ou le « salaire de l’homme » est une chimère. Les mères monoparentales ont besoin de bons emplois comportant des avantages. Les lesbiennes ne comptent pas sur le salaire d’un homme. Et pourtant, les employeurs profitent de la notion de famille nucléaire ‘idéale’ pour justifier leur position qui consiste à accorder un moins bon salaire aux « emplois féminins » que celui accordé aux « emplois masculins. ».

Même un emploi « convenable » ne comble pas tous les besoins de la famille « typique » de la classe ouvrière. Quand les gouvernements créent deux classes d’emplois, ils peuvent prétendre que les femmes ont besoin de la « flexibilité » de postes temporaires qui leur permettent de s’occuper des enfants et d’ajouter un supplément de revenu à celui de leur époux.

Toutefois, la flexibilité est d’ordinaire défini du point de vue des besoins de l’employeur pour du travail à bon marché, et non du point de vue des besoins de la famille. Les employeurs (et même les gouvernements) chercheront toutes les justifications possibles pour maintenir leurs coûts peu élevés.

Nous avons plutôt besoin d’un « minimum vital » pour l’ensemble des travailleuses et travailleurs, peu importe qu’ils aient à s’occuper de jeunes enfants, de parents vieillissants ou de parents ne pouvant pas travailler au Canada ou qui sont malades ou encore, pour s’occuper de leur propre sécurité financière.

Nous devons reconnaître que tous les hommes ne trouvent pas un emploi stable et bien payé comportant des avantages et de la dignité. En fait, les hommes immigrants et les travailleurs de couleur peuvent être hautement qualifiés et hautement éduqués mais se retrouver avec un emploi occasionnel ou à temps partiel. Une personne née à l’étranger et membre d’une minorité visible gagne en moyenne 78 cents pour chaque dollar gagné par une personne née à l’étranger mais qui a la peau blanche.

La Fondation canadienne des relations interraciales rapporte qu’il existe une « discrimination cachée » qui nuit aux minorités visibles et aux Autochtones au Canada et les empêche d’atteindre l’égalité sur le plan de l’emploi.

Le rapport démontre que les Autochtones et les membres des minorités visibles sont confrontés à une forme de racisme subtil comme, entre autres, « être ignoré pour une promotion, être affecté à des tâches déplaisantes, être stéréotypé, et être exclu du ‘groupe’. »

On peut également lire ceci dans le rapport :

« Bien que les membres des minorités visibles aient généralement un niveau d’éducation supérieur à celui de la population canadienne à la peau blanche, ces personnes connaissent des niveaux d’emplois et de salaires moins élevés… Les personnes membres d’une communauté visible et nées à l’étranger ou les Autochtone sont surreprésentés dans la portion de 20 pour cent des travailleuses et travailleurs les moins bien rémunérés et sous-représentés dans la portion de 20 pour cent des travailleuses et travailleurs les mieux rémunérés. Seulement 29 pour cent des membres de minorités visibles nés au Canada et 21 pour cent de membres de minorités visibles nés à l’étranger, ayant un diplôme universitaire, font partie de la portion supérieure des 20 pour cent sur l’échelle salariale comparativement à 38 pour cent des personnes nées au Canada et ayant la peau blanche. »

Certaines études ont démontré que le nombre d’emplois à temps plein du secteur public dans le domaine du traitement de données et du soutien administratif a été énormément réduit au cours de la dernière décennie.

Le Congrès du travail du Canada rapporte que les femmes de couleur, les femmes autochtones et les femmes ayant une invalidité qui commençaient à peine à prendre leur place sont maintenant refoulées.

C’est toujours la même histoire : la dernier arrivé part le premier.

Qu’avons-nous réussi à faire?

Dans les hôpitaux du Manitoba, les sections locales du SCFP ont été confrontées à un effritement graduel des postes à temps plein. Les employeurs traitaient le personnel régulier à temps partiel comme du personnel occasionnel même si l’expression « à temps partiel » était définie comme se rapportant à « une personne qui travaille régulièrement un moins grand nombre d’heures que si elle était engagée à temps plein, mais pas moins de sept heures et trois-quarts dans une période de deux semaines » (Art. 702 (b)).

Les sections locales du SCFP formulaient sans cesse des griefs à ce propos en alléguant qu’une personne qui complète régulièrement au moins un quart de travail pour chaque période de paye devrait être considérée comme travaillant à temps partiel, et obtenir des avantages calculés au prorata.

Au cours de la ronde de négociation provinciale en 1999, le Conseil provincial des soins de santé a négocié un examen paritaire périodique des postes occasionnels. La tâche consistait à les convertir en postes réguliers pour des travailleuses et travailleurs qui désiraient accroître leur nombre d’heures de travail. Les 8 500 travailleuses et travailleurs de la santé ont obtenu une amélioration de leur salaire et avantages et un plus grand nombre d’emplois à temps plein.

En Nouvelle-Écosse, la loi sur les syndicats (Trade Union Act) interdit le recours à la grève pour des revendications syndicales visant à recruter des travailleuses et travailleurs occasionnels. Néanmoins, il y a deux ans, les membres du SCFP, à Sydney, se sont engagés à faire entrer les travailleuses et travailleurs occasionnels dans l’unité de négociation.

Au bout de dix ans de conventions collectives sans changement, les comités de négociation ont commencé à faire appel à la conscience des employeurs en utilisant une stratégie très agressive. « Je serai là chaque fois que vous lèverez le petit doigt, à me battre pour les droits de ces travailleuses et travailleurs », déclarait Barb Kowalski aux employeurs de Sydney. « Si vous dites non, de toute façon je vais déposer un grief. »

Aujourd’hui, trois ans plus tard, la très grande majorité des conventions collectives de Sydney ont intégré les travailleuses et travailleurs occasionnels. Avec ces personnes dans l’unité de négociation, les droits du personnel occasionnel peuvent constituer un motif pour faire la grève. Le travail à faire, maintenant, est d’augmenter leurs salaires et avantages. Cette question a pris de l’importance dans les engagements de négociation provinciale du SCFP.

En 1998, le Syndicat de la voirie de Nouvelle-Écosse (section locale 1867 du SCFP) ratifiait sa première entente au bout de presque 10 ans de gels et de compressions de salaires. Des gains importants ont été réalisés pour le personnel occasionnel dont les membres deviennent membres réguliers du syndicat après deux ans au lieu de trois, et après avoir travaillé un plus petit nombre d’heures. Plus de 200 membres du personnel occasionnel sont désormais admissibles à une paye de vacances et à des prestations de retraite.

Les membres du SCFP de l’Ontario, au Centre d’accès aux soins communautaires de Windsor/Essex ont mis un terme à une grève de trois mois avec une nouvelle entente qui comporte un montant de salaire compensatoire au lieu d’avantages pour le personnel à temps partiel et occasionnel.

Les travailleuses et travailleurs de la Ville de Toronto (section locale 79 du SCFP) ont été confrontés à une restructuration majeure et à une importante fusion. Cette situation a fait entrer 12 000 travailleuses et travailleurs occasionnels non syndiqués dans l’unité de négociation à temps partiel.

La plupart des travailleuses et travailleurs sont saisonniers et sont liés aux programmes des parcs et loisirs. La section locale 79 a mis sur pied un comité pour découvrir combien d’entre ces personnes travaillent plus de 35 heures par semaine. Ce n’est pas une tâche facile étant donné qu’il y a 853 lieux de travail différents.

Au début des négociations de l’an 2000, la ville refusait de définir la semaine de travail. La section locale 79 craignait que là-dessous se cache une intention de la ville de définir chaque travailleuse et travailleur comme ‘occasionnel’ et la question des heures de travail a fini par devenir une question inconcessible.

« Nous pensions que la chose allait de soi. La vieille entente avec la Ville de Toronto avait 55 ans. L’entente avec le Grand Toronto datait de 1954. Nous pensions que c’était éternel. C’était une pierre angulaire. Mais la ville s’est positionnée comme un tout nouvel employeur et voulait repartir à zéro », déclarait le conseiller syndical du SCFP Jack Kirby. « Cette même situation se présentera de nouveau chaque fois qu’il y aura fusion dans une autre ville, par exemple à Montréal. Et c’est pour la même raison qu’il a fallu faire la grève à Kingston. »

Au bout de onze jours de grève, la section locale 79 était en mesure d’obtenir que l’on intègre les anciennes dispositions sur les heures de travail dans l’entente avec la Ville de Toronto. « Nous n’aurions jamais pu y parvenir sans défoncer des murs », de dire Jack Kirby.

Depuis la fin des années 1970, l’employé ‘occasionnel’ signifiait généralement employé ‘saisonnier’ pour les cols bleus de la ville de Régina (section locale 21 du SCFP). Bien que syndiqués, certains travailleurs et travailleuses avaient travaillé entre 15 et 20 ans comme employés occasionnels sans indemnité de décès ni congé de maladie. Ces personnes obtenaient une portion de leur paye de vacances à chaque paye de sorte que beaucoup d’entre elles travaillaient toute l’année.

Suite à l’entente de 1993, des améliorations étaient apportées au statut du personnel occasionnel. La direction de la section locale et le directeur de la ville s’accordaient pour qu’entre 40 et 50 postes occasionnels deviennent permanents. Dans la section locale 21, le personnel occasionnel a un poste désigné à la direction de la section locale.

Quand l’employeur a commencé à profiter de cette catégorie pour combler certains postes avec du personnel occasionnel, le syndicat a réagi. Certains employés, par exemple les personnes qui s’occupaient du stade de football, pendant l’été et l’automne, étaient maintenues en poste pour s’occuper des patinoires intérieures et extérieures en hiver. La direction de la section locale a adopté la position selon laquelle ces postes étaient permanents et devaient être affichés. Grâce à un effort important en 1999, beaucoup de postes ont été affichés.

Comme le décrivait le conseiller syndical du SCFP Malcolm Matheson, « la direction syndicale a dû demeurer sur ses gardes et s’assurer que ces postes soient affichés. Autrement, l’employeur aurait continué de vouloir engager une personne pour du travail à la pièce pour ensuite la licencier. »

Ce qui précède vaut également pour la main-d’œuvre principalement féminine qui travaille à l’hôtel de ville. La section locale 7 a obtenu le statut et les avantages des emplois à temps plein pour du personnel considéré comme « occasionnel à temps plein » en 1987, mais les modalités d’application étaient très précises.

Dans l’entente de 1993, certaines améliorations ont été apportées. « En ce moment, il y a près de 20 travailleuses et travailleurs occasionnels dans la section locale 7 mais de temps en temps, le nombre augmente à 50 ou 60 et le syndicat a dû se battre pour que ce nombre redescende. C’est une lutte incessante pour les cols blancs », déclarait M. Matheson.

La section locale 3197 du SCFP, Ville d’Edmonton, a négocié le statut et les avantages du temps plein pour le personnel occasionnel. Voici comment cela fonctionne :

L’employeur trouvait difficile de combler les vides dans les horaires de travail découlant des absences de courte et de longue durée, des vacances, des sessions de formation, des heures compensatoires et des journées de maladie, et d’une forte demande pour du personnel occasionnel. En analysant les absences potentielles dans le temps, il était possible de prévoir les besoins continus et de créer des emplois à temps plein uniquement pour combler les vides dans les horaires de travail.

Ceci profite à l’employeur dans la mesure où il n’a pas à payer des heures supplémentaires ou à maintenir un réservoir d’employés disponibles « sur appel ». Bien que les nouvelles personnes employées doivent travailler dans différents lieux, leurs horaires de travail sont prévus d’avance. Elles ont également un emploi permanent, des prestations de maladie et une indemnité de retraite.

Une variation de ce modèle est présentement à l’étude avec les employeurs d’hôpitaux. Elle fournirait un réservoir commun d’employés à horaires variables qui seraient envoyés vers différents lieux de travail sur une base continue.

Qu’est-ce que nous pouvons faire d’autre à ce propos?

Que pouvons-nous faire d’autre pour nous attaquer au problème de l’embauche du personnel occasionnel quant à la charge de travail qu’elle affecte? Voici quelques réponses possibles.

  • Intégrer les travailleuses et travailleurs occasionnels et à temps partiel à l’unité de négociation pour que les employeurs ne puissent plus diviser le personnel syndiqué et le personnel non syndiqué.
  • Lutter pour obtenir des modifications aux lois du travail afin que les droits syndicaux soient accessibles aux travailleuses et travailleurs occasionnels et à temps partiel et pour limiter l’utilisation que font les employeurs du personnel à temps partiel et occasionnel.
  • Élaborer des stratégies de négociation pour convertir les postes occasionnels et à temps partiel en postes à temps plein.
  • Négocier des avantages pour le personnel occasionnel.
  • Formuler un grief sur la question, si nécessaire.
  • Déposer une demande de conciliation si rien ne bouge à la table de négociation.
  • Tester en arbitrage les dispositions de la convention collective, par exemple « le travail de l’unité de négociation » ou « interdiction de faire de la de sous-traitance ».
  • Tendre vers l’élimination complète de la classification « occasionnelle ».
  • Négocier un plafond pour le nombre d’employés occasionnels dans l’unité de négociation ou une proportion de postes à temps partiel par rapport aux postes à temps plein.
  • Négocier une liste de tâches que les employés occasionnels ne peuvent pas effectuer (pratiquement tout ce que les membres de l’unité de négociation font normalement).
  • Négocier un recrutement sur place pour les postes réguliers pour que la diversité de la communauté se reflète dans les milieux de travail de la fonction publique.
  • Encourager le gouvernement à reconnaître l’expérience et la reconnaissance professionnelles internationales afin que certaines barrières artificielles n’empêchent par les immigrantes et les immigrants d’occuper des postes permanents à temps plein.
  • Faire campagne en faveur du programme national de services de garde.
  • Sensibiliser les membres à la question.
  • En faire une question inconcessible.
  • Adopter une approche ‘agressive’ à l’égard des obstacles législatifs et
  • Commencer à représenter le personnel à temps partiel et occasionnel et négocier en leur nom même si ces personnes ne peuvent pas adhérer au syndicat; se comporter comme si ces personnes étaient membres afin d’obliger l’employeur à les reconnaître.

Conclusion

Afin de s’attaquer aux problèmes de la surcharge de travail engendrés par la précarisation, le SCFP doit demeurer ferme en exigeant que les employeurs engagent un personnel à temps plein suffisant pour être en mesure de remplacer les travailleuses et travailleurs en vacances, en congé de maladie ou absents pour d’autres motifs.

En adoptant cette politique, les employeurs n’ont pas besoin d’avoir recours à du personnel occasionnel et les travailleuses et travailleurs peuvent rentrer de leur congé sans être confrontés à une montagne de travail en retard. Ils contribueront également à maintenir l’excellente qualité et la continuité des services publics.

Les membres du SCFP ne veulent pas que la concurrence entre employés vienne miner les gains durement obtenus à la table de négociation. Les travailleuses et travailleurs à temps plein et occasionnels savent toutes et tous que la réaction du SCFP au problème ne peut pas être qu’occasionnelle.

Il faut que toutes les travailleuses et tous les travailleurs réagissent collectivement aux pressions de nos employeurs qui s’efforcent de transformer nos emplois en ‘emplois occasionnels’.