Les paradis fiscaux

(Source CANSIM - 376 - 0051)

Pierre Ducasse | Services des communications du SCFP

Alors que de nombreux politiciens défendent la nécessité des politiques d’austérité, des milliards et des milliards de dollars échappent aux gouverne- ments en raison des paradis fiscaux.

Un pays est considéré comme un paradis fiscal lorsqu’il permet à des entreprises privées ou à des individus de payer un taux d’imposition nul ou ridiculement bas. En ayant recours aux paradis fiscaux, des grandes entreprises et des riches ne paient pas d’impôts dans leur propre pays.

On estime qu’au moins 270 milliards de dollars sont « investis » par des compagnies canadiennes dans les paradis fiscaux comme la Barbade, le Luxembourg, les Îles Caïman, les Bahamas et les Bermudes.

L’économiste du SCFP, Toby Sanger, estime que le problème est plus large encore. « Il existe une nuance entre l’évitement fiscal, qui est légal, et l’évasion fiscale, qui ne l’est pas. Or, on ne pratique pas uniquement l’un ou l’autre dans les paradis fiscaux. Ces pays, où règne le secret bancaire, servent aussi à cacher de l’argent aux créanciers et à blanchir les produits de la criminalité ou de la fraude », a-t-il affirmé.

Coûts

Puisque ces stratagèmes fiscaux sont souvent secrets, complexes et nébuleux, il est difficile d’évaluer le montant exact des pertes en revenus pour nos gouvernements. Pour sa part, le directeur du groupe Canadiens pour une fiscalité équitable, Dennis Howlett, croit que ce chiffre pourrait atteindre 7,8 milliards de dollars par année.

Le chercheur au Réseau pour la justice fiscale, Alain Deneault, pense que la situation est même pire. « Les données que nous avons de Statistique Canada, ce sont les chiffres déclarés par les entreprises. C’est seulement la pointe de l’iceberg. Il y a certainement beaucoup plus d’argent que cela qui échappe au fisc », a-t-il déclaré.

Selon lui, l’existence même des paradis fiscaux entraîne une « concurrence fiscale » entre les pays, ce qui les amène à niveler leurs impôts sur les revenus des riches et des grandes entreprises privées vers le bas. Cela a comme effet d’ajouter au déficit et de justifier la réduction et la tarification de nombreux services.

L’évasion fiscale a des conséquences directes. Elle entraîne des compressions en santé, en éducation, dans les services de garde à l’enfance, dans les services aux aînés, dans les infrastructures publiques et dans le transport en commun, entre autres.

« On coupe dans les services publics en nous disant qu’il n’y a pas d’argent disponible, mais c’est un mensonge », a lancé Toby Sanger.

« Le Canada est responsable de son malheur. C’est le Canada qui a signé consciemment des accords avec des paradis fiscaux pour permettre à des investisseurs canadiens de réduire leurs impôts », a conclu Alain Deneault.

Heureusement, nous pouvons collectivement faire le choix de mettre fin à l’évasion fiscale.