Le bien-être des Canadiens dépend de la solidité du filet social, particulièrement en période économique difficile. Ce qu’on appelle aujourd’hui l’assurance-emploi (AE) est un élément essentiel de ce filet. Les travailleurs et leurs communautés doivent pouvoir compter sur l’AE lorsqu’ils en ont le plus besoin. L’AE devrait aider les travailleurs à joindre les deux bouts, et devrait permettre d’atténuer le choc encaissé par les communautés frappées par les licenciements.

Le programme canadien d’AE aura 75 ans en octobre. Mais ce pilier de notre filet social s’est effrité au rythme des compressions.

Principaux changements à l’assurance-emploi

Octobre 1940 : Création de l’assurance-chômage (AC) par le gouvernement fédéral de Mackenzie King, avec l’approbation unanime des provinces. Les travailleurs doivent cotiser à l’AC pendant 180 jours au cours des deux années précédentes pour toucher des prestations qui varient de 6 à 52 semaines. Le régime couvre seulement 40 pour cent de la population active.

1955 : Élargissement des règles de l’AC, qui couvre près de 75 pour cent de la population active. Les prestations sont toutefois limitées à 36 semaines.

1971 : Création, sous le gouvernement Trudeau, de la nouvelle Loi sur l’assurance-chômage. 95 pour cent des salariés sont couverts, et ce pour un maximum de 50 semaines. Ajout des prestations de maladie et de maternité.

1977 : Création de conditions d’admissibilité variables selon les régions. Les personnes qui vivent dans une région à faible taux de chômage doivent travailler plus longtemps pour toucher des prestations.

1990 : Arrêt de la cotisation du fédéral au programme. Celui-ci est maintenant financé entièrement par les employés et les employeurs.

1990-1996 : Réduction du montant et de la durée des prestations sous les gouvernements Mulroney et Chrétien.

1996 : Changement au nom du programme, désormais appelé assurance-emploi (AE). Le gouvernement Chrétien resserre les conditions d’admissibilité, qui deviennent deux fois plus sévères dans certains cas. La couverture tombe à 50 pour cent des travailleurs. Dans les années 1990 et 2000, le fédéral retire plus de 50 milliards de dollars des surplus de la caisse d’AE pour les ajouter à ses revenus.

2012 : Resserrement important de l’accès à l’AE par le gouvernement Harper. Les demandeurs sont forcés d’accepter des emplois qui étaient jusque-là jugés inappropriés. Le gouvernement Harper réduit aussi le personnel et l’accès à la procédure d’appel. La couverture tombe à moins de 40 pour cent des travailleurs.

2015 : Le gouvernement Harper puise 2,7 milliards de dollars dans la caisse de l’AE pour soi-disant équilibrer le budget fédéral et financer une baisse d’impôt pour les personnes à revenu élevé.

À cause de toutes ces compressions, la portée de l’AE est à son niveau le plus bas en 75 ans : elle couvre à peine 39 pour cent de la population active. Malheureusement, l’AE laisse tomber la majorité des chômeurs. La bonne nouvelle, c’est qu’il ne faudrait que quelques changements pour redresser la situation. Tout ce que cela prendrait pour revitaliser l’assurance-emploi à l’occasion de son 75e anniversaire, c’est l’élection d’un gouvernement progressiste à Ottawa en octobre.